Caribou forestier au Québec : Protéger notre joyau nordique en péril

Le caribou forestier est désigné comme espèce vulnérable depuis 2005 sa situation ne s'est pas forcément améliorée depuis. Sa chasse est interdite depuis 2001 et quelqu'un qui abat un caribou forestier s'expose à une amende allant jusqu'à 20 000$. Le seuil de perturbation du caribou est très bas (35%), ce qui explique sa sensibilité aux perturbations humaines. Selon les données les plus récentes du Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP), la population de caribous forestiers au Québec est estimée entre 5000 et 10 000 individus sur une période s'étendant de 2005 à 2016. Cependant, il est important de noter que cette estimation comporte une marge d'incertitude significative. Malheureusement, d'autres indicateurs suggèrent un déclin important de ces populations emblématiques.

À travers différentes régions du Québec, les populations de caribous forestiers font face à une précarité croissante, avec certaines d'entre elles frôlant même le seuil de l'extinction. Par exemple, la population de Val-d'Or ne compte plus que sept individus qui vivent en enclos depuis 2020, témoignant d'une situation critique. De même, la population de caribous de Charlevoix, composée potentiellement de 16 individus, a été placée en enclos en 2022 dans le but de les protéger. Ces chiffres alarmants mettent en évidence la nécessité d'agir de manière urgente et concertée pour préserver nos populations de caribous forestiers. La baisse de la population de caribous forestiers au Québec est principalement attribuée à la perte et à la fragmentation de leur habitat. L'expansion des activités humaines, telles que l'exploitation forestière et minière, a entraîné la destruction de vastes étendues de forêts boréales, réduisant ainsi les aires de reproduction et de pâturage du caribou forestier. Selon une étude menée par l'Université Laval en collaboration avec le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec, près de 40 % de l'aire de répartition historique du caribou forestier a été perdue ces dernières décennies en raison de la dégradation de l'habitat.

La fragmentation de l'habitat a également eu un impact majeur sur la population de caribous forestiers. Lorsque leur habitat est morcelé, les caribous se retrouvent isolés dans de petites poches de territoire, ce qui rend plus difficile leur déplacement entre les aires de reproduction et de pâturage, ainsi que leur échappatoire aux prédateurs. Cette fragmentation favorise également l'augmentation des populations de prédateurs, tels que le loup, qui trouvent plus facilement accès aux caribous dispersés et vulnérables.

Les perturbations causées par les activités humaines ont également contribué à la diminution de la population de caribous forestiers. De plus, les perturbations liées aux loisirs en plein air, tels que les véhicules motorisés, les randonneurs et les skieurs, peuvent perturber les comportements de reproduction et de pâturage des caribous. Ces perturbations répétées peuvent causer du stress et réduire la disponibilité des ressources alimentaires, ce qui nuit à la survie et à la reproduction des caribous.

Mesures de conservation

Face à la baisse alarmante de la population de caribous forestiers, des mesures de conservation ont été mises en place pour protéger cette espèce emblématique. Le gouvernement du Québec a adopté des plans de rétablissement et des stratégies de conservation visant à réduire la perte d'habitat, à limiter les perturbations humaines et à contrôler la prédation des caribous par les prédateurs.

Comme mentionné, certaines régions du Québec ont mis en place des zones d'exclusion de la chasse afin de protéger les populations de caribous forestiers. Par exemple, la Réserve faunique des Laurentides, située dans la région de Charlevoix, a établi des zones où la chasse est interdite, permettant ainsi aux caribous de bénéficier d'une protection accrue. De plus, certaines forêts bénéficies d'une gestion adaptative. Cela vise à tenir compte des besoins spécifiques du caribou forestier dans la planification et l'aménagement forestiers. Des stratégies de gestion ont été mises en place dans différentes régions, telles que la réduction de la coupe à blanc, la préservation des vieilles forêts et la création de corridors de déplacement pour favoriser la connectivité des habitats. Par exemple, la région de la Côte-Nord a développé des plans de gestion forestière adaptés pour soutenir la conservation du caribou forestier.

Les réserves de biodiversité quant à eux constituent des aires protégées qui visent à préserver la diversité des écosystèmes, y compris les habitats du caribou forestier. Par exemple, la Réserve de biodiversité projetée de la Rivière-Ouelle, située dans le Bas-Saint-Laurent, vise à protéger les habitats critiques du caribou forestier et d'autres espèces en voie de disparition.

Finalement, le Québec a établi plusieurs aires protégées à l'échelle provinciale qui contribuent également à la conservation du caribou forestier. Par exemple, le parc national des Grands-Jardins, dans la région de Charlevoix, offre une protection à cette espèce en maintenant des habitats appropriés et en limitant les perturbations humaines. La collaboration entre le gouvernement, les industries, les communautés autochtones et les organismes de conservation est essentielle pour assurer la conservation à long terme du caribou forestier au Québec. Des efforts concertés sont nécessaires pour préserver l'habitat, contrôler les activités industrielles et promouvoir une cohabitation harmonieuse entre les êtres humains et les caribous.

En complément de ces mesures, des actions temporaires peuvent être mises en place pour éviter la disparition d'une population de caribous ou contribuer à sa survie à court terme en attendant le rétablissement des conditions favorables à leur habitat. L'objectif de ces mesures est d'atténuer les facteurs ayant le plus d'impact sur le déclin des populations. Parmi les mesures disponibles, on retrouve :

• L'utilisation d'enclos de maternité pour protéger temporairement les femelles caribous en gestation et leur progéniture des prédateurs.

• La mise en enclos de l'ensemble ou d'une grande partie d'une population de caribous pour les mettre à l'abri des prédateurs.

• Le contrôle des prédateurs du caribou, tels que les loups, les ours noirs ou les coyotes, dans les habitats fréquentés par les caribous.

• La gestion adaptée des espèces de proies alternatives qui pourraient attirer les prédateurs dans les habitats du caribou, comme par exemple l'orignal.

• La réduction des perturbations liées au développement industriel et aux activités récréotouristiques dans les zones occupées par les caribous.

• La surveillance des activités de récolte, notamment la chasse, pour minimiser l'impact sur les populations de caribous forestiers.

En ce qui concerne les populations de caribous forestiers isolées, des mesures spécifiques de gestion ont été mises en place par le gouvernement en collaboration avec ses partenaires. Parmi ces mesures, on peut citer :

• La mise en enclos temporaire des caribous forestiers de la population de Val-d'Or en mars 2020, avec un agrandissement de l'enclos en 2021.

• Un moratoire sur les coupes forestières dans le territoire du plan d'aménagement du site faunique du caribou au sud de Val-d'Or, en attendant l'adoption de la stratégie pour les caribous forestiers et montagnards.

• La construction d'un enclos de protection et de maternité pour la quasi-totalité de la population de caribous de Charlevoix en février 2022, sans relâchement annuel des caribous.

• La création d'un enclos de maternité en Gaspésie, où seules les femelles gestantes sont placées temporairement chaque année pour protéger leur progéniture des prédateurs.

• Le contrôle des prédateurs (loups, ours noirs ou coyotes) dans les habitats fréquentés par les populations de caribous forestiers de Val-d'Or et de caribous montagnards de la Gaspésie.

• L'intensification des captures de loups dans l'habitat des caribous de Charlevoix afin de limiter leur prédation.

• L'encadrement des activités de développement industriel et récréotouristique dans les habitats des caribous pour minimiser les perturbations.

En conclusion, la diminution de la population de caribous forestiers au Québec est principalement due à la perte et à la fragmentation de leur habitat, ainsi qu'aux perturbations humaines. La mise en œuvre de mesures de conservation ciblées est essentielle pour assurer la survie de cette espèce emblématique et préserver l'intégrité des écosystèmes forestiers du Québec.

Sources :

1. Université Laval - Projet Caribou Québec. [https://www.projetcaribouquebec.ca/]

2. Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec. [https://www.mffp.gouv.qc.ca/]

3. The Canadian Encyclopedia - Woodland Caribou. [https://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/woodland-caribou]

4. Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec). [https://www.snapqc.org/]

5. La situation du caribou au Québec - Gouvernement du Québec. [https://www.quebec.ca/agriculture-environnement-et-ressources-naturelles/faune/gestion-faune-habitats-fauniques/situation-caribou]

6. Revue de littérature sur les facteurs impliqués dans le déclin des populations de caribous forestiers au Québec et de caribous montagnards de la Gaspésie - MFFP. [https://mffp.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/RevueLitteratureCaribou.pdf]